" En toutes les parties de la nature il y a des merveilles". Aristote (384-322 av. J.-C.)
"La nature aime à se dérober à nos yeux." Héraclite (576-480 av. J.-C.)
"Les rêveries de la volonté ouvrière aiment les moyens autant que la fin et que le travail énergique des dures et des pâtes malaxées patiemment s'anime par des beautés promises".
G.Bachelard
D'abord on observe, ensuite on creuse et enfin on s'émerveille.
De nos jours, dans le monde occidental, les potiers s'adressent aux entreprises spécialisées pour se procurer les matériaux dont ils ont besoin. A l'instar des artisans de jadis, je mets à profit la géologie du territoire pour réaliser mes pots et mes émaux.
A partir des matières brutes, une préparation plus ou moins longue est nécessaire avant d'obtenir un matériau avec lequel je puisse composer.
L' argile sèche, fraîchement extraite, peut lorsqu'elle se présente sous forme de motte compacte donner l'illusion de la roche dont elle est issue. On est loin d'imaginer à ce moment la pâte molle et plastique que l'on en tirera.
Afin d'homogénéiser la matière brute, on l'immergera dans l'eau afin qu'elle se désagrège complètement. On obtient ainsi une boue, une barbotine sans cohésion que l'on versera dans un tamis pour barrer la route à l'indésirable tel que les racines et les cailloux.
Après avoir était mise à ressuer sur des plaques de plâtre, la barbotine devient plastique et modelable.
Pour les matières minérales composant mes émaux, la méthode est strictement la même, seulement j' attends qu'elles sèchent complètement pour les concasser afin d'obtenir une fine poussière homogène.
A l'état cru, l'émail est un savant mélange de minéraux pulvérisés, incapables de réagir entre eux sans cuisson. Pour qu'il puisse s'homogénéiser et former un verre stable (l'émail est un silicate tout comme le verre de nos bouteilles), une loi est à respecter: celle de l'eutexie.
Cela signifie "ce qui fond bien", c'est une loi naturelle qui veut que tout mélange de minéraux abaisse la température de fusion de l'ensemble. Isolément, celle-ci est plus élevée.
Par exemple, la craie, seule, ne fond pas à 1300° mais si je la mélange, dans des proportions exactes, avec une argile de type "grès", j'obtiens alors un émail.
Et toute la difficulté est là.
A partir d'une matière, dont la composition m'est inconnue, je dois tâtonner jusqu'à trouver un ou plusieurs éléments à lui associer qui permettra la liquéfaction du tout à 1300°, température à laquelle je cuis.